L’originalité de ce Panorama est d’interroger de manière croisée les pratiques des acteurs qui sont concernés par l’évaluation d’impact social, qu’il s’agisse d’opérateurs de projets à finalité sociale, de financeurs de ces projets, qu’ils soient publics ou privés, et d’évaluateurs, c’est-à-dire de structures qui apportent leur expertise pour accompagner les projets dans leurs démarches.
Nous avons souhaité réaliser un état des lieux exhaustif de cette discipline passionnante et montrer que, près de 15 ans après les premiers travaux de l’Avise puis de l’ESSEC sur la question, l’évaluation d’impact social a changé de visage en France : pratique complexe, expérimentée par quelques organisations précurseurs au départ, l’évaluation d’impact social est aujourd’hui une pratique, si ce n’est généralisée, du moins de mieux en mieux intégrée, y compris dans la vie d’organisations aux ressources limitées.
Le développement d’une vague d’acteurs dits « à impact », les attentes plus fortes des financeurs sur l’efficacité des solutions soutenues, et le besoin des acteurs concernés de mieux connaître leurs effets pour mieux améliorer leur action, contribuent ainsi à la diffusion progressive d’une culture de l’évaluation d’impact social.
Cette culture se caractérise d’abord pour les opérateurs sociaux par son pragmatisme : menée par des « faiseux », ils cherchent à obtenir des résultats rapidement, sur quelques mois, utilisables facilement auprès de leurs parties prenantes, plutôt qu’à mener des études longues à rigueur scientifique plus forte.
En outre, ce Panorama met en exergue l’émergence d’un métier et de structures encore inexistantes en France il y a une dizaine d’années : les acteurs menant des études d’impact ou outillant les porteurs de projets et financeurs sur le sujet. Ce milieu encore confidentiel est marqué par une transdisciplinarité des profils le composant, aux confluents de l’économie, des sciences sociales et de la gestion et s’inspire à la fois de l’évaluation des politiques publiques et des études sur le management de la performance.
Enfin, pour ce qui est des financeurs publics, des investisseurs à impact et des acteurs philanthropiques, ce Panorama fait le constat d’un passage en cours, bien qu’encore timide, d’une logique de reporting fondé sur quelques indicateurs d’activité ou des critères ESG, à un suivi plus poussé reposant sur des éléments plus précis en termes d’impact. Cependant cette dynamique est freinée par le manque de recours à des référentiels partagés.
Cette tendance est importante car, au-delà de la capacité des financeurs à inciter les opérateurs à mener ces démarches pour la maximisation de leur impact, et pour suivre et piloter leurs financements, d’autres travaux d’étude et de recherche montrent que les financeurs ont un rôle majeur à jouer dans l’utilisation des évaluations d’impact social, pour réaliser un changement systémique, puisqu’ils sont davantage susceptibles d’avoir le recul et la hauteur nécessaires à ce changement.